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Lettre pastorale – Mgr Jean-Luc Brunin

jeudi 2 avril 2020Expression de l'évêque

Aux laïcs, consacré-e-s, diacres et prêtres du diocèse

  • Quelques jours après mon retour de visite ad limina à Rome, j’ai été rattrapé par une mauvaise fièvre. Plusieurs jours durant, j’ai eu une température élevée. Le test effectué s’est révélé être positif au coronavirus. Suivi par un personnel médical et infirmier compétent et investi que je remercie sincèrement, je n’ai développé aucune complication de type respiratoire. Aujourd’hui, les médecins considèrent que je suis guéri, même s’il me faut encore du repos pour retrouver des forces. J’ai pu vivre cette période en communion avec tous ceux et celles qui ont subi cette infection virale, ainsi qu’avec leur famille. Chaque jour, j’ai porté dans la prière les personnes affectées et celles qui, hélas, en sont décédées. Que tous ceux et celles qui, nombreux, m’ont témoigné leur soutien, leur affection et leur prière, trouvent ici l’expression de ma gratitude.
 
Une Semaine Sainte singulière

Dans le courrier précédent que je vous avais adressé, j’évoquais un trait dominant qui ressortait des rencontres avec l’actuel Successeur de Pierre et ses proches collaborateurs. Ils insistaient prioritairement sur l’élan missionnaire que nous devions, comme successeurs des Apôtres, impulser et soutenir dans nos Églises diocésaines. Régulièrement, on nous a rappelé la priorité de l’annonce de l’Évangile, la manifestation de la proximité de Dieu à tous les hommes et la manifestation concrète de Sa Miséricorde auprès de tous, en priorité des plus pauvres.

Revenu de la visite ad limina avec ce qui fait le cœur de l’enseignement magistériel du pape François, je ne pensais pas être si tôt renvoyé au radicalisme évangélique de la mission pour notre Église. D’un coup, notre monde s’est trouvé plongé dans le calme et le silence, la misère de la pandémie s’est abattue sur notre humanité, la plongeant dans un état de sidération.

Une remise en cause de la marche de l’histoire

Ceux qui pensent faire l’histoire sont souvent fascinés par l’« homme augmenté », la recherche de performance, de pouvoir, d’auto affirmation de soi et de manipulations diverses. Ils sont aussi souvent  confinés dans une indifférence mondialisée aux injustices et aux misères des plus fragiles, des plus pauvres, des déplacés et des réfugiés. Mais voici que, brutalement, l’humanité est renvoyée à ses limites, ses fragilités et ses faiblesses !

Nous gardons en mémoire la belle célébration de prière que notre pape François a menée, seul, sur la Place Saint Pierre vide, face à la Croix du Christ, le 27 mars dernier. Il nous a livré dans son commentaire de l’évangile de la tempête apaisée (Marc, 4), la clef de compréhension de ce qui est en train de se jouer pour notre humanité. Jésus est présent dans la barque, avec nous. Face à notre effroi, Il nous appelle à dépasser l’angoisse et la peur pour habiter la confiance en sa force d’amour. Ce temps d’épreuve devient pour nous, un temps de choix pour avancer autrement vers l’avenir. Car l’annonce de l’Évangile à laquelle Il nous associe, ne vise pas un aspect cosmétique de l’existence, mais elle a partie liée à la marche de notre humanité.

A la suite du Christ sur le chemin de Sa Passion et de Sa Résurrection

En cette Semaine Sainte 2020, nous sommes privés des célébrations. C’est vrai pour les communautés paroissiales comme pour les jeunes qui s’étaient préparés à vivre le week-end JMJ à Fécamp. Peut-être y-a-t-il une grâce à accueillir qui peut soigner notre espace intérieur ? Confinés géographiquement, nous découvrons que c’est le Crucifié-Ressuscité qui établit le lien avec Lui, avec Son Père et entre nous, ses disciples. Dans sa méditation, le pape suggère la suite du Christ en cette Semaine Sainte, comme un profond chemin de conversion. En embrassant la Croix, il nous invite à reconnaître la nécessité de « trouver le courage d’embrasser toutes les contrariétés du temps présent, en abandonnant un moment notre soif de toute puissance et de possession, pour faire place à la créativité que seul l’Esprit est capable de susciter. C’est trouver le courage d’ouvrir des espaces où tous peuvent se sentir appelés, et permettre de nouvelles formes d’hospitalité et de fraternité ainsi que de solidarité. Par sa croix, nous avons été sauvés pour accueillir l’espérance et permettre que ce soit elle qui renforce et soutienne toutes les mesures et toutes les pistes possibles qui puissent aider à nous préserver et à sauvegarder ».

Aidons-nous à accueillir en profonde communion, ce Souffle d’Espérance qui entraîne notre suite du Christ et l’annonce de l’Évangile vers des horizons nouveaux. Ma prière de pasteur durant ces Jours Saints, se fera intercession pour que tous et chacun, nous puissions vivre les mystères de la Passion à hauteur de l’Espérance que le Ressuscité nous apporte et dont Il nous fait les serviteurs pour notre monde actuel.

Retrouver les moyens de vivre ces jours saints en communion

Les propositions ne manquent pas pour que chacun et chacune puisse vivre intensément les jours saints qui s’inaugurent. Que soient remerciés ici les prêtres et les groupes liturgiques qui, en lien avec le Service Diocésain de la Pastorale liturgique et sacramentelle et la Conférence des évêques de France, fournissent ce qui peut nourrir notre méditation de la Parole et des saints mystères, ainsi que la prière unanime d’un Peuple de Dieu confiné, mais profondément uni en Christ qui nous rassemble sous les bras de Sa Croix.

Permettez que j’aie une pensée particulière pour les prêtres et les diacres qui renouvelleront, dans le secret de leur cœur, la consécration qui a ordonné leur vie au service du Christ et de l’Église. Sachez que je serai uni à chacun de vous dans le secret de notre communion sacramentelle et fraternelle.

Lors de la fête de l’initiation chrétienne à la Cathédrale, j’ai appelé des frères et des sœurs pour célébrer un des sacrements de l’initiation. Je comprends la déception qui doit être la leur et celle de leurs proches, de voir repoussée la célébration à laquelle ils s’étaient préparés avec leurs accompagnateurs et leurs communautés locales. Qu’ils sachent que je les porte dans ma prière pour que ce temps ne soit pas un temps vide, mais un temps d’approfondissement sur le chemin du sacrement. Je sais que Véronique Frégard et l’équipe diocésaine ne manqueront pas de proposer une démarche qui ne les privera pas de la beauté de leur engagement à la suite de Jésus. La communauté diocésaine aura à cœur de les accompagner dans la prière et dans un moment de célébration festive.

« Ne nous laissons pas voler l’espérance » nous dit souvent le pape François. Le moment est venu de le réentendre en ce temps de crise. C’est Lui, Jésus, notre Espérance ! Il nous invite à prendre la route avec Lui pour en témoigner au monde. Que le Seigneur vous accorde largement sa bénédiction durant ces jours saints.

Votre évêque,

+ Jean-Luc BRUNIN

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